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Le salon de mrs pepys

~ carnet de lecture

Le salon de mrs pepys

Archives de Catégorie: Littérature française

Brillant comme une larme

26 mardi Mai 2020

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française

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années folles, Découvertes, Histoire, littérature, Paris, Radiguet

La vie de Raymond Radiguet n’a pas été très longue, mais elle fut vécue avec une intensité à nulle autre pareille. A 14 ans, alors que la Grande Guerre fauche ses aînés, il séduit Alice. Elle a dix ans de plus et est fiancée à un poilu, mais cela le stimule plus que ne l’effraie. L’adolescent mène la vie d’un homme mûr. Il s’affuble de vêtements trop grands, d’un chapeau et d’une canne. Il devient « Monsieur Bébé », qui se démène pour se faire un nom dans la presse, écrit pour divers journaux et revues, apprend à se faire connaître. Il séduit, les hommes qui deviennent ses mentors mais pas ses amants, et les femmes, qu’il met plus volontiers dans son lit. Il apprend l’amour en même temps que la littérature. Et, sous la houlette de Jean Cocteau, le succès est au-rendez-vous.

Cette biographie romancée est une belle surprise, une pépite découverte un peu par hasard (merci les blogs !). Radiguet, même pour ceux qui n’ont pas (encore) lu son Diable au corps, ne peut laisser indifférent. Cet adolescent, qui ne fut en fin de compte qu’une promesse de l’homme qu’il aurait pu devenir, a accompli bien plus que d’autres en davantage d’années. Il est un personnage passionnant, paradoxal à souhait. L’auteure s’efforce de bien maîtriser son sujet, et insiste – parfois un peu maladroitement – sur le nombre de personnes influentes que le jeune Raymond a su séduire, ou bien agacer. Il sait se faire des amis comme des ennemis en osant imposer son ambition, et un roman qui défie la morale bien-pensante. Cocteau, Max Jacob, Gabrielle Chanel, Picasso, Breton ont croisé son chemin, l’ont admiré, apprécié ou jalousé.

L’exercice était périlleux, mais Jessica L. Nelson tire son épingle du jeu. Hormis quelques passages un tantinet didactiques, elle parvient à rendre compte de l’atmosphère des années folles, où la créativité artistique se libère autant que les mœurs. Radiguet lui-même, tout héros qu’il est, n’est pas épargné. Ses excès, ses errances sont aussi bien soulignés que son talent ou sa générosité.

C’est de la belle ouvrage, dévorée en une grosse journée, annotée et susceptible de séduire aussi bien les béotiens que les amateurs de Radiguet.

Brillant comme une larme, Jessica L. Nelson, 2020.

 

« La fougue adolescente se conjugue à un élan qui, chez lui, vient du plus profond : cette conviction immuable qu’il doit vivre tout, et vite. Certains êtres développent un mal-être mystérieux qu’on appelle acouphènes. Raymond, lui, est né avec le tic-tac entêtant d’une pendule au fond des entrailles qui le rapproche, sans qu’il puisse l’arrêter, d’un abîme qui ressemble à la mort. »

« Il est atrocement habillé mais ne porte pas si mal ses guenilles – par quelle alchimie étrange peut-on avoir de l’allure sans style ? »

 

 

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Avenue des géants

06 mercredi Mai 2020

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française, Policier et thriller

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aux Etats-Unis, biographie, Famille, serial killer

Son premier meurtre passe inaperçu. On n’a pas idée, aussi, de choisir le jour où le Président Kennedy est assassiné. Pourtant, Al Brenner est un adolescent intelligent : on lui a dit qu’il avait un QI supérieur à celui d’Einstein. Cela ne lui épargne pas un séjour dans un institut psychiatrique, dont il ressort libre, et rapidement blanchi. Il rêve d’avenir, de construire une carrière. Mais c’était sans compter sur un accident de moto, qui le renvoie dans les jupes de sa mère, et à ses activités peu recommandables.

Écrire le récit  à la première personne est un choix surprenant, mais pertinent. Il rend le personnage d’Al Brenner plus touchant, presque sympathique par moment, au point qu’on est parfois à deux doigts de le plaindre. C’est d’autant plus étonnant que l’histoire racontée par Marc Dugain s’inspire très largement de celle d’Edmund Kemper, un véritable tueur en série américain. Le dilemme constant qui déchire le personnage principal, son manque d’empathie souvent, son franc parler, et sa candeur à certaines occasions le rendent humain. Il est impossible d’oublier les crimes commis. Cependant le point de vue proposé au lecteur oblige à éviter de juger, à chercher à comprendre l’impensable.

Un thriller, qui tient ses promesses.

Avenue des géants, Marc Dugain, 2012.

La dictatrice – en bref

30 lundi Mar 2020

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française

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Découvertes, Histoire

De temps à autres, je me plais à écrire un billet très synthétique pour Instagram, par envie de varier les supports et, il faut bien le dire, par facilité aussi. En voici un, pour ceux qui ne fréquentent pas Instagram…

C’est un roman qu’on a beaucoup vu au moment de sa sortie. Des commentaires élogieux, qui donnent envie de foncer illico chez son libraire favori.
On s’installe dans un fauteuil, une tasse de thé à portée de main, et zou !

En 2023, Aurore Henri est à Munich. Elle assiste à l’assassinat de l’Europe par ses dirigeants et, la colère aidant, elle se laisse aller à un geste qui la conduit en prison, fait basculer sa vie. Aurore devient la figure de la révolte, puis celle de l’espoir en un monde meilleur.
Mais c’est oublier que, souvent, le meilleur est l’ennemi du bien.

Aurore est la dictatrice, celle qu’on guide vers le pouvoir parce qu’elle est une figure qui plaît au peuple. Elle est celle qui échappe à ceux qui l’ont faite, qui s’impose, et qui perd peu à peu pied avec la réalité.

C’est un roman réussi, nourri de références historiques (le parallèle avec le nazisme est – trop ? – net) et vitaminé au féminisme. Le tableau de l’Europe ravagée par une crise inimaginable, les portraits des arrivistes de tout poil en ces temps difficiles, et surtout le personnage d’Aurore qu’on admire, et qu’on se prend peu à peu à aimer détester quand elle franchit les bornes, font de cette fiction une échappée dans un monde qu’on espère ne jamais voir.

Une lecture en apnée, idéale pour ces jours où on a un peu plus de temps, coupés que nous sommes des futilités du quotidien ordinaire.

La dictatrice, Diane Ducret, 2020.

Maîtres et esclaves

17 dimanche Mar 2019

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française

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à la campagne, Chine, ELLE, Histoire, peinture

Naître dans les prémices d’un régime politique n’est pas nécessairement de bon augure. La destinée de Tian Kewei (né en 1950, dans une province reculée en bordure d’Himalaya) et celle de la toute jeune République populaire de Chine sont intimement liées dans l’intrigue joliment ficelée par Paul Greveillac. Il retrace, dans un style d’une élégance et d’une complexité peu comparables à celles des auteurs à la mode, la vie d’un jeune homme issu d’une famille considérée comme droitière mais gravissant néanmoins les échelons de la société communiste.

Ce personnage principal est pourtant doté d’un caractère si falot et d’une intelligence si limitée qu’on ne peut l’appeler héros. Il semble subir sa vie plus qu’il n’en choisit les étapes, son seul atout étant son intérêt pour le dessin et la peinture. Autour de lui, les personnages secondaires constituent une riche galerie, où hommes et femmes agissent avec plus de courage et de noblesse que le pauvre Kewei – ce qui les conduit inévitablement à une fin dramatique. Le meilleur ami du peintre et son fils sont ainsi sacrifiés aux passions de leur époque.

Ces choix amènent à penser que le héros du roman n’est pas tant Kewei que la Chine communiste, parcourue de soubresauts au rythme des réformes voulues par Mao et ses successeurs. Difficile de se passionner pour un personnage aussi inconsistant, tandis que les différents épisodes de l’histoire chinoise contemporaine offrent mille rebondissements, des drames et des espoirs. Le tableau de la Chine maoïste que peint l’auteur est minutieux et vraisemblable à tous points de vue. Les évolutions politiques et sociales sont rendues avec finesse et permettent au néophyte de se familiariser avec l’histoire de la République populaire. Quant à faire de Kewei un artiste, cela propose une entrée aussi originale que représentative dans les évolutions idéologiques. Jolie mise en abyme que cette double approche via l’art des remous historiques. Et mise en bouche sans doute, avant une exploration de la bibliographie de Paul Greveillac.

Maîtres et esclaves, Paul Greveillac, 2018.

Edmonde

25 lundi Fév 2019

Posted by mrspepys in Biographie - autobiograpie, Littérature contemporaine, Littérature française

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biographie, Famille, Histoire, Italie, souvenirs

Un personnage atypique et une époque (l’entre-deux-guerres et la Seconde Guerre mondiale) qui fait toujours recette : cet hommage à la jeunesse d’Edmonde Charles-Roux a tout d’un portrait classique, destiné à plaire. Entre recherches documentaires et ajouts fictionnels pour remplir les blancs de l’histoire, cet Edmonde est une manière de reconstitution historique, où les faits sont scellés élégamment d’un ciment littéraire de qualité.

Si le propos n’est pas en soi d’une grande originalité, l’ouvrage a le mérite de se lire avec plaisir. Le style est élégant, parsemé de pointes d’humour. L’admiration de l’auteur pour son personnage est palpable. Derrière l’écrivain se tient une femme sensible et sensée, qui ne s’appesantit pas sur ses états d’âme. Les émotions tiennent néanmoins une place importante dans ce récit, mais sans jamais basculer dans le sentimentalisme ou le pathos. Le deuil d’Edmonde Charles-Roux, à qui son amour de jeunesse est enlevé brutalement, est mis en scène avec retenue et dignité. Dans son combat pour venir en aide à sa sœur autant que dans ses emportements contre un supérieur irritant se lisent une volonté sans faille et un attachement à des valeurs inculquées par une famille républicaine convaincue.

Entre les extraits de lettres empruntées à la correspondance d’Edmonde Charles-Roux et le récit, point de solution de continuité. Un portrait réussi, en somme.

Edmonde, Dominique de Saint-Pern, 2019.

Trois fois la fin du monde (MRL18)

08 jeudi Nov 2018

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française

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à la campagne, Famille, nature

Enfant sage et employé modèle, Joseph Kamal n’aurait jamais dû connaître la prison. Mais pour dépanner son frère, il l’assiste pendant un braquage. Qui tourne mal. C’est à la fois le début d’une nouvelle vie pour Jo, et la fin d’une vision du monde. Se plier aux règles du milieu carcéral n’est pas une sinécure, et quand enfin celui qui a hérité du surnom de Bigoût parvient à trouver sa place survient la catastrophe. La pagaille qui succède à une explosion nucléaire permet à Joseph de prendre la tangente. Il fait partie des bienheureux immunisés, qui peuvent continuer à vivre normalement dans la zone contaminée. Et il ne s’en prive pas, s’installant dans une petite ferme où il recueille un mouton et un chat.

Si le passage de Joseph en prison n’occupe qu’un tiers du roman, la violence qui s’en dégage coupe le souffle. Le lecteur n’est guère plus prêt que Jo à affronter ces quelques dizaines de pages. L’installation progressive dans la zone interdite, la découverte de la vie rurale, de ses joies simples et de ses contraintes apparaît alors comme un retour au paradis. L’opposition entre ces deux aspects du roman est si brutale qu’on prend le temps de savourer les aventures du Robinson Crusoé moderne. Il s’est choisi son île et apprend à l’aménager. Le ton et le style changent. Le rythme de lecture aussi. Déboussolé, le lecteur, même s’il n’est qu’en partie séduit par le propos, ne peut qu’admirer le tour de force de faire cohabiter des aspects aussi différents de la vie. Il s’agit peut-être de faire réfléchir à la nature humaine, mauvaise et violente dans les villes qui l’avilissent, et apaisée dans un décor champêtre. Plus qu’à Defoe, c’est finalement à Rousseau que fait songer Trois fois la fin du monde. Avec un dénouement qui vient confirmer le besoin de société de tout être humain.

Trois fois la fin du monde, Sophie Divry, 2018.

Une lecture pour les Matchs de la Rentrée littéraire, organisés chaque année par Rakuten. (#MRL18)

Quelques brèves de lecture

15 dimanche Juil 2018

Posted by mrspepys in Littérature étrangère, Littérature contemporaine, Littérature française, Policier et thriller

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Berlin, en bref, Histoire, Paris

Allez ! on ouvre les fenêtres et on époussette un peu. Pendant que la France retient son souffle, rendons à la vie ce salon délaissé pour satisfaire aux exigences de la vraie vie. Le temps et l’envie d’écrire des billets m’ont manqué ces dernières semaines, alors que j’ai continué à (beaucoup) lire. Il y a donc matière à quelques brèves de lecture, des idées pour les vacances peut-être.

Malgré un titre français fort mal choisi, Deux dans Berlin est un roman policier plutôt réussi. Hans-Wilhelm Kalterer est à peine remis d’une blessure par balle quand ses supérieurs lui demandent de renouer avec ses fonctions d’enquêteur pour élucider le meurtre d’un nazi de la première heure. Sous les bombardements des Alliés, dans une ville en ruines où tout manque, même l’espoir, l’ancien de la SS se trouve rapidement sur les traces d’un ancien déporté revanchard. Précision et finesse caractérisent autant la construction de l’intrigue que le contexte historique (les auteurs sont historiens). Dans une atmosphère de fin de règne, les deux personnages principaux ouvrent les yeux sur la mascarade que fut leur vie. Ils ont appréhendé de manière très différente le temps du nazisme, mais en comprennent avec autant de stupéfaction les ressorts. L’histoire racontée à deux voix tient en haleine, et s’achève sur un dénouement bien choisi.

Deux dans Berlin (Wer übrig bleibt, hat recht, en vo), R. Birkefeld et G. Hachmeister, 2002.

Conseillé par une amie, Victor Hugo vient de mourir associe aussi récit historique et fiction. Au printemps 1885, une légende vivante s’apprête à rendre son dernier souffle. Du politicien au vendeur de journaux, des admirateurs aux contempteurs, tout Paris a l’esprit tourné vers ce qui s’annonce comme un événement historique. A peine a-t-il succombé que se met en branle l’organisation de ses obsèques, qui aboutit à la première panthéonisation républicaine. Ce récit, particulièrement bien documenté, emporte le lecteur dans une chronique où se croisent collectif et particulier. Le style d’une grande sobriété sert à la fois la solennité de l’événement et la mise en scène du chagrin des proches. Un texte beau et juste.

Victor Hugo vient de mourir, Judith Perrignon, 2015.

 

1144 livres

10 jeudi Mai 2018

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française

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Famille, Livres, Premier roman, souvenirs

Tout commence par une lettre peu ordinaire. Le narrateur, né sous X, apprend, sous la plume de maître Noblecourt, que sa mère lui lègue l’ensemble de sa bibliothèque. Que voilà un héritage symbolique pour un bibliothécaire ! Quoiqu’un peu dérouté, le narrateur accepte de rencontrer le notaire, mais il rechigne à recevoir ces 1 144 livres qui l’attendent dans des cartons. Pourtant la curiosité finit par l’emporter. Et c’est une exploration peu commune qui débute.

Dans un roman très court et très dense, Jean Berthier entrecroise deux thèmes qui, de prime abord, n’ont guère de relation. La filiation,  et notamment le lien entre un enfant adopté et ses parents biologiques, sont exposés avec beaucoup de retenue, et une grande finesse. Malgré tout l’attachement que le narrateur porte à sa famille d’adoption, il exprime, envers celle qui l’a abandonné, des sentiments ambivalents, entre ressentiment et curiosité. Toutefois, son amour pour les livres, en tant qu’objets autant que pour leur contenu, le conduit à dépasser ses impressions premières.

Avec le narrateur, on s’interroge sur ce qu’une bibliothèque révèle de son propriétaire, autant que sur la place de la lecture, ou sur le rôle des bibliothèques publiques et de leurs actions. On se laisse enfin aller à noter, au cas où, quelques idées de lecture. C’est, en somme, un agréable premier roman que livre Jean Berthier.

1144 livres, Jean Berthier, 2018.

 

Quand les histoires de nazis remportent des prix

31 samedi Mar 2018

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française

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Histoire, Livres prêtés

Sans être une grande fanatique des romans récompensés par les prix littéraires de tout poil, je me suis laissée allée à la lecture du Goncourt et du Renaudot.

C’est avec Josef Mengele que je me suis lancée. Sous une identité empruntée, Josef Mengele débarque en Argentine, où les débuts sont plus pénibles qu’il ne l’imaginait. Grâce au régime péroniste bienveillant, le médecin SS en cavale se construit une nouvelle vie, osant même recouvrer son nom et envisager un avenir  heureux. Mais au tournant des années 1960, la traque des anciens nazis est relancée et, avec elle, un jeu de cache-cache avec les autorités. Du Paraguay aux marges rurales du Brésil, de planque en planque, Mengele est contraint de confier sa sécurité à différents individus peu amènes. Il s’aigrit et se ronge les sangs. Il se prend aussi à rêver, parfois, de retrouver sa famille.

Le récit d’Olivier Guez se lit comme une enquête où le point de vue serait celui du criminel. A la place de l’enthousiasme ou des découragements du chasseur, ce sont les craintes et les faux espoirs de l’homme traqué qui sont dépeints. On en oublierait presque, par moments, qui est le personnage central, ce qu’il représente. L’auteur est toutefois assez fin pour éviter que son lecteur prenne en pitié celui qui fut l’inhumain médecin d’Auschwitz. Force est de constater que Josef Mengele, s’il n’a pas fini en cellule ou sur un échafaud, expie ses crimes, lentement et sûrement, à mesure que ses angoisses le rongent. Entre roman et récit historique, ce texte dérange autant qu’il renseigne.

La Disparition de Josef Mengele, Olivier Guez, 2017.

Retour en arrière dans le temps et en Europe avec Eric Vuillard. En février 1933, les nazis doivent asseoir leur pouvoir. Il leur faut remporter les élections et bâillonner les opposants. Contre l’assurance de voir leurs activités prospérer, vingt-quatre grands patrons d’industrie déploient leur carnet de chèque. Le résultat de cette générosité ? la consolidation du régime nazi au point qu’il déborde chez son voisin autrichien. Car le coeur de ce roman aux accents fortement historiques est l’Anschluss. Là se trouve l’essentiel de l’intrigue, où sont narrés par le menu toutes les petites victoires mais aussi les déboires des Allemands dans cette entreprise d’annexion.

Pour évoquer un sujet qui n’a rien de léger au premier abord, Eric Vuillard renoue avec son habituelle ironie et le ton pince-sans-rire qui le caractérise. Il dénonce ainsi avec talent les méthodes retorses d’un Goebbels, la naïveté confondante de Chamberlain. La soumission des dirigeants autrichiens tourne au grand guignol et l’entrée de l’armée allemande sur le sol nouvellement allié à la farce. Un joli tour de force, d’autant plus que le style est moins frénétique, plus posé que dans d’autres textes de l’auteur. L’hésitation entre histoire et fiction reste, elle, bien présente. Et c’est là tout ce qu’on apprécie chez Eric Vuillard.

L’ordre du jour, Eric Vuillard, 2017.

Merci à Anne et Pierre-Alexandre, qui ont eu la gentillesse de me prêter ces deux livres.

 

La variante chilienne

08 lundi Jan 2018

Posted by mrspepys in Littérature contemporaine, Littérature française

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aventure, souvenirs

Aux premiers jours des vacances, Pascal et Margaux, une de ses élèves, prennent leurs quartiers d’été dans un hameau retiré. Ils viennent y chercher calme – pour lire et travailler – et discrétion – Margaux ayant un peu malmené un butor malintentionné. Seul un voisin est susceptible de contrarier leurs plans. Mais Florin se révèle aussi discret que de bonne compagnie. C’est que ce fumeur de pipe a une bien étrange manière de conserver ses souvenirs. Il lui faut, pour raconter les mille et une aventures de sa vie bien remplie, tâter les cailloux qui lui servent de pense-bêtes. Et ses histoires sont un prétexte suffisant pour réunir, chaque soir, cet improbable trio.

De ce second roman de Pierre Raufast, moult critiques louangeuses ont été écrites, notamment par mes camarades blogueuses. Difficile de passer ensuite : tout a été dit, ou presque. Car ce roman, comme le précédent, est un délice. On y retrouve un foisonnement d’histoires, qui, cette fois, ne s’imbriquent pas les unes dans les autres, mais se succèdent au fil des séances de remémoration de Florin. Les personnages comme les situations sont hautement pittoresques, et révèlent la richesse de l’imagination de Pierre Raufast. On sourit, voire rit, beaucoup (pauvres vers luisants…). Toutefois certains souvenirs sont émouvants, si ce n’est carrément tristes : les trois personnages, même la toute jeune Margaux, ont vécu des moments douloureux, où la mort s’est invitée plus qu’à son tour. Le ton reste néanmoins léger et l’optimisme domine.

Les récits de Pierre Raufast sont de véritables remèdes contre la morosité, qui mériteraient un remboursement de la Sécu. Et dire qu’il m’en reste un à déguster ! Cette seule perspective met du baume au cœur en cette morne journée de rentrée.

La variante chilienne, Pierre Raufast, 2015.

 

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