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Un mois belge sans Simenon ne peut être un mois belge, même si, cette année, j’ai osé faire une infidélité à Maigret.

Entre la boutique du rez-de-chaussée et l’appartement du premier étage, un colimaçon de fer facilite le quotidien des époux Lomel. Pourtant, Étienne, contraint régulièrement à rester alité depuis plusieurs mois, voit d’un œil nouveau ce lien entre vie professionnelle et vie personnelle. Il s’inquiète de ce qu’il est devenu coutumier de nommer ses « crises », à savoir des douleurs abdominales aiguës.  Il soupçonne son épouse de chercher à l’empoisonner et, à l’affut, se penche au-dessus de l’escalier de fer pour épier la vie de la boutique. C’est qu’il sait, lui qui a pris la place d’un premier mari décédé au moment opportun, combien Louise est inflexible quand il s’agit de faire aboutir un projet.

Si L’escalier de fer n’est pas à proprement parler un roman policier, l’atmosphère autant que la trame de l’intrigue sont empreintes de ce suspense propre aux enquêtes de Simenon. Le récit est écrit du point de vue d’Étienne, l’époux qu’on cherche à éliminer. Attentif au moindre mot ou geste de son épouse comme de son amie d’enfance, de plus en plus méfiant, il agit en enquêteur, allant jusquà filer Louise. Tout ce travail met le lecteur extrêmement mal à l’aise, car Étienne s’inquiète d’une mort qui n’a pas encore eu lieu, la sienne. Comme souvent chez Simenon, le crime et la noirceur se terrent dans un quotidien d’une banalité apparente. On comprend très progressivement la monstruosité de la situation, à mesure que les gestes de tous les jours se lisent à la lumière du crime qui se profile (ou qui a eu lieu, chez Maigret). Et la chute, pessimiste, achève aussi brutalement qu’intelligemment cette histoire.

Les lecteurs de Simenon trouveront dans ce roman un air de déjà-vu très confortable, et les néophytes une ambiance qu’ils chercheront à retrouver en continuant à découvrir cet auteur.

L’escalier de fer, Georges Simenon, 1953.

En plus du roman, quel plaisir de découvrir la collection « côté belge » de la maison L’âge d’homme ! Le catalogue n’est pas bien long, mais il a le mérite d’exister.

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